google-site-verification: googlede319a3eacee1517.html Ecrire est un sport de combat: L’étrangère.... Louis Aragon

samedi 4 septembre 2010

L’étrangère.... Louis Aragon

Il existe près des écluses
un bas quartier de bohémiens
Dont la belle jeunesse s'use
a démêler le tien du mien
En bandes on s'y rend en voiture
ordinairement au mois d'août
Ils disent la bonne aventure
pour des piments et du vin doux

On passe la nuit claire à boire
on danse en frappant dans ses mains
On n'a pas le temps de le croire
il fait grand jour et c'est demain
On revient d'une seule traite
gai sans un sou vaguement gris
Avec des fleurs plein les charrettes
son destin dans la paume écrit

J'ai pris la main d'une éphémère
qui m'a suivi dans ma maison
Elle avait les yeux d'outremer
elle en montrait la déraison
Elle avait la marche légère
et de longues jambes de faon
J'aimais déjà les étrangères
quand j'étais un petit enfant

Celle-ci parla vite vite
de l'odeur des magnolias
Sa robe tomba tout de suite
quand ma hâte la délia
En ce temps-là j'étais crédule
un mot m'était promission
Et je prenais les campanules
pour les fleurs de la passion

A chaque fois tout recommence
toute musique me séduit
Et la plus banale romance
m'est l'éternelle poésie
Nous avions joué de notre âme
un long jour une courte nuit
Puis au matin bonsoir madame
l'amour s'achève avec la pluie

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